Le masculin l’emporte sur le féminin.
Voilà ce qu’on nous apprend à l’école.
Parce que c’est une règle grammaticale.
En français, le masculin l’emporte sur le féminin lorsque les deux sont dans un groupe. Même si le groupe est composé de dix femmes et un seul homme.
Voilà qui n’est pas anodin.
Voilà qui n’est guère égalitaire.
Le langage structure notre pensée et nos représentations mentales, et participe dès lors à l’égalité (ou non-égalité) des hommes et des femmes.
L’écriture inclusive a pour volonté de changer les perceptions, de faire évoluer les mentalités en la matière, en rendant le langage non-discriminant.
Oui, mais, comment ? Il existe une série de techniques de rédaction pour rendre un texte plus égalitaire.

Avant de les citer, je voudrais parler de la féminisation des noms de métiers et fonctions. Je trouve, pour ma part, que c’est tout à fait normal.
Pour la petite anecdote, j’utilisais le mot « auteure » pour me qualifier. C’est en lisant une collègue, Valéry K. Baran, une autrice dont j’apprécie la plume mais aussi la personnalité (c’est une femme intelligente, réfléchie, prévenante, avec laquelle il est très agréable de discuter) que, petit à petit, l’idée d’utiliser le mot « autrice » a fait son chemin. Au départ, je trouvais ce mot laid. Mais tout est question d’habitude. Quand Valéry m’a appris qu’en réalité, « auteure » est un néologisme et que le terme « autrice » existait il y a bien longtemps, j’ai fait mon choix.

Eh oui, la langue française était plus égalitaire il y a quelques siècles qu’elle ne l’est aujourd’hui. C’est au XVIIème siècle que le mot « autrice » a été banni du vocabulaire, par des hommes désireux de renforcer l’ordre masculin. Des hommes qui savaient donc très bien le rôle joué par le langage en matière d’égalité des sexes.
Avant, les règles d’accord étaient celles de la proximité : l’accord de l’adjectif ou du participe passé se fait avec le sujet le plus proche du verbe (Marc et Sophie sont belles) ou majoritaire : s’il y a plus d’hommes, accord au masculin, s’il y a plus de femmes, accord au féminin.
Ces règles ont été supprimées, au profit du « masculin l’emporte sur le féminin », car, puisque le français ne possède pas de forme neutre, à l’instar de l’anglais ou de l’allemand, il a été décidé par une poignée d’hommes que ce serait la forme masculine, plus « noble » (d’après eux, bien évidemment) qui serait dès lors la forme générique.
C’est donc récent, et surtout, ça n’a aucune légitimité linguistique.
Inutile de vous dire que moi, féministe, ça m’agace. Très fort. Alors si je peux apporter ma petite contribution à l’effort égalitaire à travers mes textes, je ne vais pas m’en priver.

Donc, concrètement, ces techniques, quelles sont-elles ?

Il y a le point médian pour marquer le genre des mots (exemple : les artisan·e·s, les étudiant·e·s,…). 
Personnellement, si j’utilise le point médian pour communiquer, je n’en mets pas dans mes romans. J’estime qu’il nuirait à la lisibilité du récit, en fait, pour être franche, je trouverais ça tout à fait imbuvable dans un texte de fiction. Voilà, c’est dit. Pardon à celles et ceux qui l’adorent.

Autre technique, le dédoublement : mentionner par ordre alphabétique les formes au féminin et au masculin (elles et ils se mirent à courir). Avec retour aux accords de proximité et majoritaire.
Autant le dédoublement ne me gêne pas de façon ponctuelle (si c’est tout le temps, ça risque d’alourdir le texte), autant les anciennes règles d’accord me perturbent (petite nature, que voulez-vous) (alors que je sais très bien que c’est une question d’habitude – j’ai mis deux ans quand même à intégrer le terme « autrice »).

C’est comme l’utilisation des formes linguistiques non binaires (par exemple les pronoms neutres ou mixtes : iel, iels, yels, ille, illes), j’ai du mal. Pourtant, ça devrait me plaire, c’est neutre. Mais ça sonne tellement peu naturel, pour moi. Je ne dis pas que je n’y viendrai jamais, mais il me faudra un peu de temps.

Donc je préfère la prochaine technique.
Qui est de privilégier les mots épicènes, c’est-à-dire dont la forme est la même au masculin qu’au féminin. Par exemple le ou la destinataire, un ou une artiste, les élèves.

Cependant, ce n’est pas toujours possible, et ma technique favorite est la tactique de l’évitement. À savoir, soit utiliser une tournure de phrase impersonnelle (le lectorat plutôt que les lecteurs et lectrices), soit changer la formulation de la phrase (il l’avait revue plutôt que ils s’étaient revus).
Je suis plutôt douée à ce petit jeu, parce que je pratique depuis un moment déjà : quand je ne suis pas certaine d’un accord, je transforme la phrase, pour être sûre de ne pas faire d’erreur (oui, parce que j’ai parfois la flemme de vérifier, certaines règles grammaticales sont tellement alambiquées qu’on passe des heures à chercher, et que j’ai autre chose à faire, par exemple, écrire !).
Donc, adopter cette méthode pour l’écriture inclusive ne m’a pas posé de problème. Je veille dorénavant à ne plus utiliser « ils » dans mes romans si une femme est présente dans la scène décrite. J’ai d’ailleurs effectué quelques changements dans Mosaïque de toi, car pas facile de se débarrasser des mauvaises habitudes, ainsi que dans L’étreinte des vagues (réédition prochainement). Je ferai pareil à la relecture des autres romans que je compte autoéditer, et, pour mes prochains romans, j’espère que ça sera devenu un réflexe.

Et vous, qu’en pensez-vous ?

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Photo d’illustration : Michael Festus

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